Vous êtes ici >> Accueil/Annaba Actualités/"Le retour de Chakib Khelil ou la revanche du cercle présidentiel s...
Zone Membre
Publicités

"Le retour de Chakib Khelil ou la revanche du cercle présidentiel sur le DRS"

Publié le 25/04/2019
"L'Année du Maghreb" la rédaction "Chakib Khelil et le scandale des Panama Papers. Le retour de Chakib Khelil ou la revanche du cercle présidentiel sur le DRS, Le 17 mars 2016 restera marqué dans les annales judiciaires algériennes. Non pas que la justice algérienne se soit faite remarquer par un verdict prononçant la condamnation de hauts responsables impliqués dans de grandes affaires de corruption et de détournement de biens publics, mais plutôt par le retour de l’ancien ministre de l’Énergie Chakib Khelil en Algérie, lui qui fait l’objet d’un mandat d’arrêt international, prononcé en 2013 par le procureur général d’Alger Belkacem Zeghmati. Un retour qui n’est point anodin, ni dans la forme ni dans le fond. Dans la forme tout d’abord. L’ancien ministre de l’Énergie est rentré en Algérie, via l’aéroport d’Oran en venant de Paris. À son accueil au salon d’honneur, l’attendait le wali (préfet) de cette ville, signe que cette réception a été décidée par les hautes autorités politiques algériennes et que le processus de réhabilitation de Chakib Khelil est bien engagé. Certes, il avait été initié par les déclarations de l’ancien secrétaire général du FLN, Amar Saidani, lequel avait qualifié Khelil de meilleur ministre de l’Énergie que l’Algérie ait connue depuis son indépendance. Mais les honneurs qui lui ont été faits à l’aéroport d’Essenia d’Oran sont un marqueur palpable de la volonté d’une faction importante du pouvoir politique algérien de réhabiliter l’ancien ministre. Pour ce qui est du fond, l’ancien ministre, au regard du mandat d’arrêt international lancé contre lui, est justiciable. Une procédure judiciaire devait être engagée contre lui. Or, non seulement elle n’a pas été engagée, mais le mandat a été annulé, pour vice de procédure et son retour s’est fait avec les honneurs. Pourtant, lors du procès de l’affaire Sonatrach 1 son nom a été maintes fois cité. Les personnes qui se sont relayées à la barre ont, à plusieurs reprises, évoqué son nom comme étant l’ordonnateur des contrats de gré à gré signés par la Sonatrach avec certaines compagnies étrangères, dont la plus fameuse reste la société italienne SAIPEM. Car outre le non-respect des procédures dans la passation de contrats – la procédure de gré à gré étant devenue la règle alors qu’elle doit être l’exception – il est reproché à Chakib Khelil d’avoir reçu près de 198 millions d’euros pots-de-vin dans le cadre d’un contrat de 8 milliards d’euros passé avec la société italienne SAIPEM, filiale du géant italien ENI. Dans cette affaire, le nom de Farid Bejaoui, le neveu de l’ancien ministre des Affaires étrangères, Mohamed Bejaoui, est également cité. Intermédiaire incontournable dans cette transaction, Farid Bejaoui est soupçonné d’avoir reçu à son tour des pots-de-vin de la part de cette compagnie et d’avoir également contribué à blanchir cet argent à travers les sociétés qu’il possède, via notamment le cabinet d’affaires Mosack-Fonseca, cité dans le scandale des Panama Papers. Le retour de Chakib Khelil a une signification avant tout politique. Pourrait-il en être autrement si l’on considère le poids que ce ministre avait dans l’Exécutif et l’importance politique du département qu’il dirigeait ? En première lecture, ce retour doit être inscrit dans le « conflit » qui oppose deux factions importantes du pouvoir algérien, à savoir la présidence de la république et le Département du Renseignement et de Sécurité. Le fait que Chakib Khelil revienne sans être inquiété est en soi un désaveu pour ce département, lequel avait joué un rôle très important dans son éviction. C’est sans doute par crainte de voir ces scandales révélés, atteindre le président et son entourage, qu’Abdelaziz Bouteflika a préféré sacrifier son ministre et néanmoins compagnon de route. De plus, et à travers ces scandales, le DRS voulait resserrer l’étau sur le cercle présidentiel notamment depuis 2009, date de la réélection d’Abdelaziz Bouteflika pour un troisième mandat. En novembre 2008, en levant l’obstacle à une réélection pour un troisième mandat par le biais d’une réforme de la Constitution, le président Bouteflika a opéré un coup de force. Or cette manœuvre n’a pas été du gout du DRS, même si l’on ne peut exclure l’acquiescement « forcé » du général Mediene. Toujours est-il que ce troisième mandat a affaibli le DRS et plus particulièrement son chef. En seconde lecture, faire revenir Chakib Khelil sans le faire juger, revient à enterrer les scandales de corruption13 et laisse entrevoir les visées du cercle présidentiel et de ses alliés, tant au sein des partis politiques comme le FLN que dans la communauté des hommes d’affaires et dans les médias. Une nouvelle carte politique et économique est en train de se dessiner. S’agit-il d’un nouveau virage, imposé de l’extérieur, et dans lequel Chakib Khelil serait partie prenante en tant que futur président ou simple ministre ? Certains le pensent. Ainsi pour l’ancien vice-président de la compagnie Sonatrach, Hocine Malti, le retour de Chakib Khalil a été imposé par les américains en vue d’accélérer la libéralisation du secteur des hydrocarbures. Et il n’exclut pas que l’ancien ministre de l’Énergie ait été choisi pour succéder à Bouteflika en 201914. Certitudes ou simples supputations, toujours est-il que l’ancien ministre n’a pas caché son souhait d’offrir ses services dans le cas où les hautes autorités algériennes feraient appel à lui. Il s’est montré d’ailleurs très actif que ce soit à travers ses interventions dans les médias, sa page facebook ou encore les tournées dans les différentes Zaouïas (confréries) du pays. Une réhabilitation plus symbolique que politique mais qui renseigne sur le nouveau mode opératoire choisi par les cercles décisionnels en Algérie. Le fait de mobiliser le registre symbolique, les zaouïas, et certains médias dociles, participe en soi d’une démarche visant la banalisation de l’insupportable, pour reprendre l’expression du journaliste Abed Charef. Ainsi réhabilité, l’ancien ministre de l’Énergie devient le symbole d’un nouvel ordre dont l’un des marqueurs principaux est une perversion de l’institution judiciaire16, qui cesse, par ailleurs, d’être l’instance par excellence où toute personne accusée, à tort ou à raison, devra se remettre pour qu’on lui rende justice. Dans le cas de Chakib Khelil, les médias et les zaouïas se sont chargés de faire justice à la place des tribunaux. Les Panama Papers Le retour de Chakib Khelil n’est pas la seule affaire qui a tenu en haleine l’opinion publique en Algérie. En mars et avril, les Algériens ont découvert que certains hommes politiques, notamment des ministres, et des hommes d’affaires possèdent des comptes off-shore. Sont plus particulièrement cités dans ce scandale, Chakib Khelil, Abdeslam Bouchouareb, Issad Rebrab, Ali Haddad, Farid Bedjaoui, Omar Habour et Réda Hemche. Ces trois derniers sont liés à Chakib Khelil à travers l’affaire des 198 millions d’euros versés à l’ancien ministre de l’Énergie, par la compagnie italienne SAIPEM (voir supra). Cette pratique est non seulement interdite par la loi sur la monnaie et le crédit, mais elle relance la question du transfert illicite des devises, une épidémie qui gangrène l’économie algérienne depuis le début des années 2000. On est dans le registre de la délinquance financière que l’État algérien semble incapable d’éradiquer, sans doute par manque de volonté politique. Mais de quelle manière ces personnes citées ont-elles réussi à créer des comptes off-shore et transférer ainsi des dizaines de millions d’euros ? Les enquêtes réalisées par le Consortium International des Journalistes d’Investigations, sur la base des archives du cabinet d’affaires panaméen Mossak Fonseca, révèlent des montages financiers ayant permis à des acteurs politiques et économiques algériens de transférer des sommes d’argent considérables en violation totale des lois algériennes, comme l’illustrent ces quelques exemples. L’ancien ministre de l’Énergie Chakib Khelil est cité dans cette enquête aux côtés de Farid Bedjaoui et Omar Habour. Ces deux derniers, selon les archives de Mossak Fonseca, ont joué un rôle prépondérant dans la conclusion de ce contrat avec la SAIPEM. Moyennant des commissions et des rétros commissions, la compagnie italienne a réussi à décrocher le contrat de 8 milliards de dollars avec la Sonatrach. À travers sa société Pearl Partners Limited domiciliée à Hong-Kong, Farid Bedjaoui a facilité le versement de ces commissions estimées à 198 millions d’euros17. Toujours selon cette enquête, une partie de cette somme a été transférée vers la société Sorung Associates INC, créée par le cabinet Mossak Fonseca18, afin de faciliter ce transfert. L’autre cas cité est celui de l’homme d’affaires Ali Haddad. Acteur incontournable dans la campagne pour la réélection d’Abdelaziz Bouteflika, aux côtés d’autres hommes d’affaires du Forum des Chefs d’entreprises (FCE)19, Ali Hadad est soupçonné d’avoir transféré des dizaines de millions d’euros à travers les contrats de sous-traitance avec, notamment, des entreprises turques. Ces opérations s’effectuaient par le bais de la société créée par le cabinet Mossak Fonseca en 2004, Kingston Overseas Group Corporation (KOGC) domiciliée aux îles vierges britanniques20. Géré par un fondé de pouvoir, le français Guy Feite, KOGC a servi notamment pour le transfert de dizaine de millions de dollars vers l’étranger, dans le cadre de contrats de sous-traitance. Nous citerons entre autres, le contrat de raccordement de la station de dessalement de Tafsout-Honaine au réservoir de Lala Setti dans la wilaya de Tlemcen et celui de la dérivation des eaux de l’Oued El Harrach à Alger. Dans les deux contrats, il était question d’acquisition de tubes en acier auprès d’une entreprise turque Erciyas Celik Boru. Le coût total est estimé à 10 millions de dollars, alors qu’il ne devait pas dépasser les 5,5 millions. Si le cas de Hadad et, dans certaine mesure, celui d’Issaad Rebrab provoque l’étonnement de beaucoup d’Algériens, celui d’Abdeslam Bouchouareb suscite une incompréhension, mêlée d’une certaine désapprobation. Le ministre de l’Industrie et des Mines à l’époque des faits était cité dans les Panama Papers. Selon les documents révélés par le quotidien français Le Monde, Abdeslam Bouchouareb possède une société, créée en avril 2015, dénommée Royal Arrival Corp, géré par le fondé de pouvoir Guy Feite22. Cette société a été créée pour gérer le portefeuille immobilier de M. Bouchouareb. Or, si ses avocats soutiennent que ce patrimoine a été acquis grâce aux ressources financières de l’ancien ministre de l’Industrie, résultats de son activité d’industriel, la question se pose cependant de savoir de quelle manière cet argent, estimé à 700 000 euros, a-t-il pu être transféré hors d’Algérie. Les Panama Papers offre un début d’élément de réponse : cet argent a été : « transféré de la BIL (Banque internationale à Luxembourg) vers NBAD Genève (National Bank of Abu Dhabi, dont la filiale suisse sise à Genève, est spécialisée dans la gestion de fortune et le financement du négoce) »23. Or, si Abdeslam Bouchouareb a gelé les activités de cette société de même l’ouverture de ce compte, durant son mandat de ministre, la question du caractère licite et moral de la possession d’un bien immobilier dans un pays étranger par un ministre de la République algérienne reste posée. En filigrane, c’est la collusion entre la politique et les affaires qui est soulevée avec acuité, notamment depuis le quatrième mandat du président Abdelaziz Bouteflika qui a permis l’intrusion déclarée des hommes d’affaires en politique. Équation intenable pour certains acteurs politiques qui s’étonnent que la justice algérienne n’ait pas réagi à ces scandales en ouvrant des enquêtes. Au-delà de l’effet médiatique que ces scandales ont eu, force est de reconnaitre que l’impact politique n’a pas été au rendez-vous. Le ministre Bouchouareb n’a pas démissionné de son poste. Pas plus que le Premier ministre Abdelmalek Sellal dont la fille, mariée à un homme d’affaires libanais, a été cité dans les archives de Mossak Fonseca. Dès lors que la justice algérienne est restée passive vis-à-vis de ces affaires, les Panama Papers n’ont pas réussi à déstabiliser le pouvoir politique algérien. Bien plus, la présidence de la République a réagi à cette affaire en portant plainte contre le journal Le Monde pour avoir publié un article dans lequel le nom du président Abdelaziz Bouteflika était cité, au même titre que certains chefs d’États africains. À la suite de quoi, le quotidien français a présenté ses excuses. Certes moins sensible que les scandales des Panama Papers, le rachat du groupe médiatique el Khabar par l’homme d’affaires Issaad Rebrab n’en révèle pas moins la difficile cohabitation entre le pouvoir de l’argent et la politique, si l’on considère que les médias sont l’un des leviers permettant d’influencer la chose politique".
« Actualité précédente
"Décidément Mohamed Bedjaoui traine les casseroles à n'en plus pouvoir"
Actualité suivante »
"Un New Deal algérien est-il possible ? "

Les Commentaires

"ON A MARCHE SUR LA TETE"

***** Un retour qui n’est point anodin, ni dans la forme ni dans le fond. Dans la forme tout d’abord. L’ancien ministre de l’Énergie est rentré en Algérie, via l’aéroport d’Oran en venant de Paris. À son accueil au salon d’honneur, l’attendait le wali (préfet) de cette ville.

Pour ajouter un commentaire, vous devez être membre de notre site !

Identifiez-vous :


Ou Inscrivez-vous gratuitement !

Dernières brèves

Articles similaires