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Annaba. Regard: Au long du Cours

Publié le 18/06/2011

Au gré de la promenade, plongée dans les richesses culturelles de la Coquette.

Annaba Au long du CoursAu cinéma, la ville, génératrice d'histoires, réceptacle d'énigmes et de passions, est parfois réduite à sa plus simple expression… Un pâté de maisons en bois, de part et d'autre d'une seule rue, ultime arène d'un combat éternel. Ou une mégalopolis de briques, de béton et de verre, aux toits si hauts qu'Icare aurait pu y tenter le «saut de l'ange», filmé en contre-plongée.

Certains personnages y naissent, y vivent et y meurent ou la fuient pendant que d'autres y arrivent. Le spectateur, par écran interposé, y est passager, locataire ou propriétaire, le temps d'un film, jusqu'à ce «que vienne la fin». Dans la littérature, les mêmes histoires se racontent différemment, bien sûr, le mot remplaçant l’image. Un livre acheté chez un bouquiniste, tout près de l'élégante Maison de l'Agriculture et de l'ancienne Poste (un véritable musée) à côté d'une pâtisserie aux croissants croustillants (pas les quartiers de lune pâteux proposés ailleurs), au cœur même d’Annaba.

Son titre, Une famille de lions, de A. A. Pienaar, roman d'aventure qui raconte l'Afrique, notre continent où les hommes comme les animaux sauvages, vivent l'enfer au paradis. Le livre a perdu sa couverture mais pas sa générosité. Il est un récit avec sa propre histoire. Ici, une phrase soulignée ; là, une tache d'encre violette ; et enfin ce cachet rond : Commune mixte de Morsott, Ecole de garçons. Et, plus on tourne les pages, plus viennent de nouvelles découvertes, attestant que ce livre a vécu plusieurs vies avec plusieurs lecteurs. Un gribouillis, la dépouille séchée d'un insecte piégé, une feuille déchirée, une autre cornée pour ne pas oublier un passage à relire ou, simplement, reprendre le fil de la lecture. Des pages marquées par la patine, dégageant une odeur de paille après une chute de pluie automnale. Avant de quitter la ville, contempler encore les quelques statues sauvées d'une disparition annoncée ou d'une mutilation vindicative (jeune éphèbe qui pêche toujours et Diane chasseresse qui n'a pas encore tiré sa flèche). S'arrêter devant ce bel immeuble, le Palais Calva, richement décoré de mascarons et dont les cariatides, supportant le balcon du premier étage face à la mer, content l'histoire. Puis, se placer face à la Mairie et vérifier si les aiguilles de la grande horloge sur le fronton, tournent enfin.

Ou lire la devise en latin et en relief de l'armoirie de la ville, en clef de voûte de la porte d'entrée du marché couvert : «Ferit et Alit» (je nourris et je pique). Ou alors, juste lever la tête en descendant de la Place d'Armes vers le Cours et découvrir une pyramide grise, le toit en ardoise du théâtre, au style simple mais élégant. Ou enfin, frayer à travers les branches noueuses des frênes centenaires et admirer la belle mosquée et les beaux restes de la Casbah ou les remarquables ornements des façades que Chronos, sous le charme, tarde à éroder définitivement, attendant peut-être le geste auguste et restaurateur d'un sauveur de cette ville antique et moderne, mais toujours charmeuse. De retour, dans un taxi, un passager pestait. On lui avait happé son portable. Entendant quelqu’un murmurer «Malgré tout, Annaba est une belle ville», il lança : «Il n'y a pas de belle ville ici... et pas de ville du tout... c'est l'esprit du souk...». Plus loin ce passager toujours en rogne, à qui je montre le livre, s’exclame : «Une famille de lions ! Oh !». Avant de poursuivre : «Le dernier des lions d'Algérie a été abattu traitreusement vers 1800 et quelques... Restent les hommes qui s'autoproclament lions… Mais des lions aux crocs cariés et qui ne rugissent plus». Sur la route, à l'horizon, se profile déjà une autre ville. Constantine, juchée sur son rocher solide et éternel, tel Atlas, 2000 ans d'histoire, capitale numide hier, capitale de l'est aujourd'hui, tirant sa sève des strates enfouies, un trésor de la ville et de l'humanité.

Ahmed Zir [PAGES HEBDO ARTS & LETTRES EL WATAN - 18-06-2011]
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