Annaba: Transport Ferroviaire - La gare se cherche désespérément

Autrefois zone importante de transit entre l’Algérie et la Tunisie, la gare ferroviaire de Annaba n’en finit plus de mourir à petit feu. Entre nostalgie et colère, embarquement pour un joyau architectural qui n’est pratiquement plus que l’ombre de lui-même.

 Autrefois fleuron du transport ferroviaire, du temps de la défunte SNCFA, la gare ferroviaire de Annaba n’en finit plus d’être l’ombre d’elle-même. Mis à part une ligne nocturne de transport de voyageurs entre la Coquette et la capitale et la ligne allant jusqu’à Sidi-Amar, rien à signaler. Un silence sinistre règne dans le hall qui ressemblerait, à s’y méprendre, à une salle d’attente dans un hôpital. Hier animée, la gare se mure dans un calme qui risque de la tuer à tout jamais. « Autrefois, il y avait beaucoup de monde dans cette gare, se souvient Aâmmi Rabah, un habitué du train. Maintenant, voyez. Elle est uniquement animée le soir vers 19 heures, pour le départ d’Alger et le matin, à l’arrivée de la même ville. Vraiment, il est temps que le ministère des Transport fasse quelque chose, sinon, ç’en sera fini du transport de voyageurs ». Vision pessimiste, donc, que du devenir du transport ferroviaire, mais vision pessimiste aussi sur le devenir de cette gare conçue durant la présence française avec une architecture hors du commun et dotée d’un minaret aux accents futuristes. Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts. Des wagons entiers croulent sur des rails usagés. La ligne électrifiée semble faire définitivement partie du passé. « Une gare ? Vous appelez ça une gare ? S’interroge avec énervement ce chauffeur de taxi, garé à proximité. Du temps de la France oui, c’était une gare, mais maintenant, avec un transport de marchandises qui est devenu périodique, un transport de voyageurs qui laisse à désirer, je pense qu’elle aurait une meilleure image en devenant un musée de la SNTF. Une gare qui ferme ses portes à 20 heures n’est pas une gare. Elle doit fonctionner le plus normalement du monde jusqu’à minuit au moins. Comment voulez-vous que les voyageurs veuillent prendre le train, et surtout la nuit, pour les familles ? Non, croyez-moi, il faut la fermer, elle ne sert plus à rien ». Lointaine et presque oubliée semble être l’époque, pourtant récente, où des départs s’effectuaient même vers Tunis. « ça remonte à il y a longtemps, évoque avec une pointe de nostalgie Khadra, de Sidi-Amar. J’avais pris le train le matin en partance vers Tunis, pour y arriver vers 17 heures. Certes, le voyage était long, mais au moins, pour aller en Tunisie, nous n’étions pas obligés comme maintenant de passer par les clandestins ». Ces derniers, d’ailleurs, investissent les lieux à chaque arrivée matinale du train d’Alger. Et interpellent, parfois de manière agressive, chaque voyageur, croyant que tous partent pour la Tunisie. Parfois, on trouve plus de taxieurs clandestins que de voyageurs, et ce, au nez et à la barbe des quelques policiers présents sur les lieux. A croire qu’un certain laisser-aller et une certaine complicité règnent en maîtres sur les lieux. Une gare qui n’en est plus vraiment une. Oubliée la ligne Bône-Souk-Ahras-Tébessa. Pointilleuse la ligne Annaba-Alger, lointaine desdescendante de l’express Bône-Alger-Koléa. La balle est dorénavant dans le camp de AmarTou et de ses collaborateurs au ministère des Transports pour faire revivre un secteur jadis florissant, et une gare qui faisait la fierté des Bônoises et des Bônois.

Le Provincial - 06/07/2013 -  Lakhdar Habib