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Annaba: Le master de droit international privé Indésirable à la fac d’Annaba

Publié le 26/02/2014

La faculté de droit de l’université Badji Mokhtar, Annaba, est parmi les dernières facultés à avoir rejoint le système LMD (2008).

Les programmes des trois années de licence ont été confectionnés par le Doyen et quelques maîtres-assistants. Les professeurs en grande partie ont été écartés. Il a été décidé que le tronc commun concerne uniquement la première année. La spécialité commence à partir de la deuxième année. Il a été institué quatre spécialités : droit international public, droit pénal et sciences criminelles, droit administratif et droit des affaires.

I - Une licence en droit sans enseignement du droit international privé
Le doit international privé n’est enseigné dans aucune des spécialités de la licence. Il ressort des dires des collègues qui ont participé à la confection des programmes que le droit international privé devait être dispensé en Master. Est-il normal qu’une matière telle que le droit international ne soit pas prodiguée en licence ?

II - Heurs et malheurs du droit international privé
Au terme de la troisième année de licence, la responsable du Domaine à la faculté de droit a convoqué une réunion pour demander aux enseignants de rang magistral de faire des propositions pour l’ouverture des spécialités en Master. J’ai demandé un temps de réflexion, et après coup j’ai décidé de faire une proposition en vue de l’ouverture d’un Master en droit international privé relatif à la spécialité «droit des affaires». La proposition a été acceptée. Elle a été avalisée par la CRUEST et le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique.

A la rentrée universitaire, j’ai appris par quelques collègues qu’il y avait des remous provenant de certains collègues qui voulaient remettre en cause l’enseignement du droit international privé en Master, et parmi eux le Doyen de la faculté. Par la suite, il me l’a fait savoir lui-même en m’expliquant que le module de droit international privé n’a pas été enseigné en licence, et de ce fait il ne peut être prodigué en Master. Je lui ai répondu que les étudiants qui ont poursuivi la spécialité «Droit des affaires» ont les bases nécessaires leur permettant de suivre des enseignements de droit international privé.

Le Doyen de la faculté ne s’est pas arrêté aux dires, il est passé aux actes. Le Master de droit international privé a fonctionné normalement la première et la deuxième années, mais au bout de la troisième année la décision a été prise sous le subterfuge du libre choix des étudiants. Le discours officiel du Doyen de la faculté clamant à qui voulait l’entendre que les étudiants de la spécialité Droit des affaires ne veulent pas s’inscrire dans ce Master. De ce fait, il l’a gelé.

En réalité, il a mis à exécution une menace. La réalité est autre : le département de droit a porté à la connaissance des étudiants par affichage que le Master était gelé. Ainsi, les étudiants ont été dissuadés de  s’inscrire en Master de droit international privé. Il m’a été rapporté et même écrit par le Doyen lui-même qu’aucun étudiant ne s’est inscrit dans ce Master. Par curiosité, j’ai pris la peine de vérifier le choix qui a été effectué par les étudiants. Surprise, car il s’est avéré que sur 72 étudiants il y avait : 1er choix : 4 étudiants, 2e choix : une étudiante, et 56 étudiants pour le 3e choix. En faisant des recoupements, j’ai trouvé que 20 étudiants pouvaient s’inscrire en Master. Actuellement, ils sont sur le carreau. Le crime qu’ils ont commis, c’est qu’ils ont choisi le droit international privé. Est-il normal que des étudiants d’une faculté comme la nôtre soient privés d’enseignement d’une discipline qui fait partie du cursus de tout licencié en droit et de tout juriste.

III - La place du droit international privé parmi les autres disciplines juridiques
Le droit international privé est la matière qui régit les relations internationales privées frappées d’un élément d’extranéité par rapport au droit international public qui régit les rapports entre les sujets du droit international (Etats et organisations internationales). Les sources du droit international privé sont principalement le droit civil et le droit commercial. Cependant, les traités internationaux peuvent être source du droit international privé, lorsque leur objet est relatif à des personnes privées. Il en est ainsi des traités bilatéraux ou multilatéraux relatifs aux investissements. Il peut y avoir des interférences avec le droit pénal, le droit administratif et le droit constitutionnel. En fait, le droit international privé est un droit carrefour.

IV – L’intérêt de l’enseignement du droit international privé
Le droit international privé est défini comme étant un droit savant, un droit noble, un droit basé sur la rigueur, le raisonnement scientifique et la logique juridique. L’intérêt de l’enseignement de cette matière provient de la richesse de son contenu. Les thèmes développés sont relatifs aux règles de conflits de lois, où les règles de rattachement impriment à ce droit une particularité qui n’existe dans aucune autre discipline juridique. Lorsqu’une relation juridique est frappée d’un élément d’extranéité, le juge n’applique pas automatiquement son droit, il est obligé de recourir à la règle des conflits de lois, qui peut désigner comme droit national le droit du juge saisi ou un droit étranger. Sont aussi étudiés les contrats internationaux, l’arbitrage commercial international, l’exéquatur, le droit international des investissements, la nationalité des sociétés, les conflits de juridictions…

La mondialisation du commerce international, et de ce fait l’implication de l’Algérie dans l’économie mondiale imposent aux différents acteurs algériens d’être au diapason avec ce qui se trame dans le monde. L’Algérie s’étant inscrite dans la logique de l’économie de marché, avec une économie ouverte sur le reste du monde, ne peut rester à l’écart de l’évolution inéluctable du marché mondial et des transformations qui le traversent, car ne pouvant être épargnée des crises cycliques qui menacent les économies nationales. L’enseignement de cette matière à l’université est destiné à faire comprendre aux étudiants les enjeux des relations internationales privées, c’est-à-dire frappé d’un élément d’extranéité.

Conclure un contrat, c’est prendre une décision et un risque. Mais c’est aussi vouloir réaliser un objectif en vue de répondre à une stratégie. Est-ce que n’importe qui peut conclure un contrat international ? En dehors des aspects financier, technique, technologique, il y a l’aspect juridique, droits et obligations des parties au contrat. Mais comme il s’agit d’un contrat international, surgit la question fondamentale relatif au règlement des différends. Cette question est déterminante. Si la faculté de droit ne forme pas des étudiants aguerris à ce genre de problème, nous serons une proie facile face à nos cocontractants étrangers. Aujourd’hui, l’arbitrage commercial international est l’objet d’un débat national découlant des affaires auxquelles sont parties la société Sonatrach et d’autres sociétés algériennes.

V – Les critiques adressées à l’Université
Il ressort des échos qui nous parviennent par l’intermédiaire des journaux les déclarations de certains responsables et des réflexions faites sur la question que les entreprises algériennes ne sont pas assez armées pour affronter ces questions. On rapporte que 50 cas de litige ont été soumis à l’arbitrage international par la Sonatrach ou contre elle avant 2010 et que, entre 2010 et 2012, il y a eu 12 cas de litige. Mais il n’y a pas que la Sonatrach, il y a aussi la CNAN, l’ENOF (Mines), Orascom Telecom, Air Algérie. La première question qui se pose est celle de savoir pourquoi il y a recours à l’arbitrage commercial international ? La 2e question qui se pose est celle de savoir pourquoi les entreprises algériennes recourent aux cabinets d’avocats et de conseil étrangers ? La 3e question qui se pose est celle de savoir pourquoi les entreprises algériennes ont perdu presque tous les procès qui les ont opposés aux sociétés étrangères ? Pour répondre à ces différentes questions, certains estiment qu’il n’y a pas assez de spécialiste dans le domaine des contrats internationaux et derechef de l’arbitrage commercial international ; par contre, d’autres considèrent que ce sont les entreprises algériennes qui boudent les juristes algériens.

Ainsi, dans tous les cas de figure, le problème de la formation se pose et la responsabilité de la formation dans tous les domaines revient à l’Université, qui est la forteresse du savoir. Pour riposter au reproche mettant en cause le manque de spécialistes en droit international privé, et ayant conscience de cette situation, j’ai estimé nécessaire de lancer un Master dans cette discipline, permettant aux étudiants d’aller jusqu’au Doctorat. C’est un Master qui a pris en considération la demande du marché à court, moyen et long termes. Malheureusement, le Doyen de la faculté de droit a cassé cet élan volontariste, causant un préjudice aux étudiants qu’il a laissés sur le seuil de l’Université et à l’économie nationale. En effet, est-il normal que les étudiants d’une faculté de droit de l’envergure de celle de l’université de Badji Mokhtar de Annaba soient interdits de poursuivre un enseignement de droit international privé en licence et en Master ? La troisième promotion de licence en droit des affaires (2012-2013) a été spoliée de son droit de poursuivre des enseignements en droit international privé durant l’année universitaire 2013-2014. La dernière question qui se pose est la suivante : où commencent et où s’arrêtent les pouvoirs d’un Doyen d’une faculté. Dix ans Barakat !

El Watan - le 26.02.14 - Pr Alliouch-Kerboua Kamel : Responsable du projet de Master Droit international privé, faculté de droit. Université Badji Mokhtar, Annaba.

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