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Liberté d'expression

Publié le 19/08/2020
Liberté d'expression Sauter à la navigationSauter à la recherche La liberté d'expression est le droit reconnu à un individu de faire connaître le produit de sa propre activité intellectuelle à son entourage1. Elle procède de la faculté de communiquer entre humains, qui a longtemps été seulement considérée comme un simple phénomène naturel conditionnant la vie sociale, avant d'être solennellement érigée en liberté individuelle, aujourd'hui juridiquement garantie mais en réalité assez étroitement encadrée. Sommaire 1 La faculté de s'exprimer, phénomène social 2 Le droit de s'exprimer, liberté individuelle 2.1 Prémices théoriques 3 Consécration dans les textes nationaux 3.1 En Allemagne 3.1.1 Loi fondamentale pour la République fédérale d'Allemagne (1949) 3.2 En Chine 3.3 En Espagne 3.4 En France 3.4.1 Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (1789) 3.4.2 Loi des suspects (1793) 3.4.3 Loi de 1881 sur la liberté de la presse 3.4.4 Loi Pleven 1972 contre les opinions provoquant à la haine raciale 3.4.5 Loi Gayssot 1990 contre les opinions révisionnistes 3.4.6 Loi contre les contenus haineux sur Internet 3.4.7 Liberté d'expression face aux religions 3.5 Aux États-Unis d'Amérique 3.5.1 Déclaration des droits - 1er Amendement (1791) 3.6 Mexique 3.7 Russie 4 Autres textes de traités internationaux 4.1 Organisation des Nations Unies 4.1.1 Déclaration universelle des droits de l'homme (art. 18 et 19) 4.2 Traités de l'Union Européenne 4.2.1 Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne 4.2.2 Convention Européenne des Droits de l'Homme (art. 9 et 10) 4.3 Charte africaine des droits de l'homme et des peuples 5 Mise en œuvre 5.1 Champ d'application étendu 5.1.1 Moyens de diffusion directe 5.1.2 Modes d'expression implicites 5.1.3 Règles corollaires 5.2 Exercice strictement encadré 5.2.1 La protection des individus et des communautés 5.2.2 Les impératifs généraux de l'intérêt public 5.2.2.1 Défense des institutions et de leurs représentants 5.2.2.2 Proscription des idées et doctrines jugées pernicieuses 5.2.2.3 Protection de l'ordre public 5.2.2.4 Circonstances exceptionnelles diverses 6 Notes et références 7 Voir aussi 7.1 Bibliographie 7.2 Articles connexes La faculté de s'exprimer, phénomène social Aussi loin que l'on puisse remonter dans l'Histoire, on observe que l'expression des idées, principalement sous sa forme verbale, mais aussi par l'écrit, a suscité l'intérêt des penseurs. À l'origine, elle était avant tout considérée comme un élément essentiel du processus de structuration sociale permettant d'atteindre les idéaux suprêmes de vérité, de perfection et de justice. Ainsi dès les vie et ve siècles avant l'ère chrétienne, en Chine, si certaines des maximes attribuées à Lao Tseu semblaient surtout inciter le sage à mener une vie purement intérieure sans exprimer ses idées2, Confucius recommandait l'attitude inverse aux êtres supérieurement évolués, affirmant qu'il leur incombait de faire œuvre de pédagogue en enseignant les lois du ciel au peuple3, car « l'homme parfait ne se borne pas à se perfectionner lui-même et s'arrêter ensuite; c'est pour cette raison qu'il s'attache aussi à perfectionner les autres êtres »4. Dans sa réflexion sur la détermination des valeurs sociales, l'antiquité gréco-romaine, considérant l'expression orale comme une forme naturelle de communication sonore propre à la société humaine, accordera elle aussi une place essentielle à son usage, dont le procédé du dialogue platonicien offre une illustration patente. Ainsi, pour Aristote : «La nature, qui ne fait rien en vain, n'a départi qu'à l'homme seul le don de la parole qu'il ne faut pas confondre avec les sons de la voix. Ceux-ci ne sont que l'expression des sensations agréables ou désagréables dont les autres animaux sont susceptibles comme nous. La nature leur a donné un organe borné à ce seul effet, mais nous avons de plus qu'eux, sinon la connaissance développée, au moins tous le sentiment obscur du bien et du mal, de l'utile et du nuisible, du juste et de l'injuste; objets pour la manifestation desquels nous a été principalement accordé l'organe de la parole. C'est ce commerce de la parole qui est le lien de toute société domestique et civile»5. Cicéron, persuadé que le premier principe naturel de la société résidait dans «le commerce de la raison et de la parole», considérait lui aussi que «c'est en s'instruisant les uns les autres, en se communiquant leurs pensées, en discutant, en portant des jugements, que les hommes se rapprochent et forment une certaine société naturelle. Rien ne nous distingue davantage des bêtes : dans quelques-unes nous reconnaissons la force, comme dans les chevaux et les lions mais jamais nous ne leur attribuons l'équité, la justice, la bonté, parce qu'elles n'ont ni la raison, ni la parole».»6. Déjà à cette époque, l'expression des idées était considérée différemment en fonction de la valeur prêtée à leur contenu, puisqu'on estimait que celles imposées à l'aide d'arguments fallacieux alors qu'elles étaient mauvaises ou injustes pouvaient s'avérer nuisibles pour la société. Ainsi, Platon, recensant les défauts des systèmes politiques de l'époque, dénonçait les courtisans qui par leurs conseils intéressés induisaient en erreur les gouvernants7. Aristote analysait les multiples facteurs susceptibles d'affecter la vérité des discours et affirmait que «celui qui fait un mauvais usage de cette puissance de la parole peut faire beaucoup de mal»8. Cicéron lui aussi, bien qu'ayant initialement assuré que l'éloquence ferait triompher le bon et le juste9, n'en reconnaissait pas moins par la suite qu'il était possible qu'un homme utilise la parole sans se soucier de la morale et du devoir, ce qui le rendait «inutile à lui-même, et nuisible à sa patrie»10. Si on estimait que le risque d'un mauvais usage de la parole ne justifiait pas qu'on l'interdise, puisque selon Aristote, une telle objection pouvait «être également dirigée contre toutes les bonnes choses, et surtout contre ce qu'il y a de plus utile, comme la force, la santé, les richesses, l'art militaire»11, on n'en admettait pas moins qu'un traitement différent soit réservé à l'expression selon son contenu et selon son auteur. Le Procès de Socrate, poursuivi et condamné pour avoir tout à la fois corrompu la jeunesse, méprisé les dieux de la Cité et tenté de leur en substituer de nouveaux, illustrait bien les risques encourus à exprimer des conceptions heurtant les titulaires du pouvoir. Platon en avait conclu que les dirigeants des cités grecques n'avaient pas la sagesse nécessaire à l'exercice de leurs fonctions, et qu'à l'époque il fallait absolument «quand on veut combattre pour la justice et si l'on veut vivre quelque temps, se confiner dans la vie privée et ne pas aborder la vie publique»12. Aussi, dans La République, prônait-il un schéma de Cité idéale dans laquelle la magistrature suprême devait être confiée à une aristocratie de philosophes spécialement recrutés et formés, détenteurs de la connaissance puisqu'ils «contemplent les choses dans leur essence»13. Un tel mode d'organisation impliquait lui aussi une inégalité de traitement entre gouvernants et gouvernés dans l'usage des facultés d'expression. En effet, à la différence des philosophes, la masse du peuple, faute d'appréhender les «essences», était réputée incapable de sagesse. Platon estimait qu'elle ne pouvait juger que «sur l'apparence»14, et ne lui prêtait donc pas de véritables «connaissances», mais des «opinions», c'est-à-dire «quelque chose d'intermédiaire entre la science et l'ignorance»15. Aussi, les critiques et suggestions qu'elle ne manquerait pas de formuler ne pouvaient qu'être illégitimes et dangereuses16, et pour préserver le bon fonctionnement des institutions les magistrats devaient les ignorer, alors qu'eux-mêmes étaient autorisés, «pour tromper l'ennemi ou les citoyens dans l'intérêt de l'État»17, à utiliser le mensonge, en revanche interdit aux citoyens. Durant quelques siècles, on continuera à apprécier la transmission des idées par référence à la nécessité de protéger des valeurs sociales, essentiellement religieuses, considérées comme suprêmes. Ainsi, pour Saint Augustin, les discussions autour de la foi en Dieu étaient toujours vaines et oiseuses18 puisque l'homme aspirant à vivre selon lui-même vit en réalité selon le mensonge alors que seul Dieu est la Vérité19. C'est à partir de la Renaissance que dans un contexte d'exacerbation des tensions interconfessionnelles, le courant humaniste, amplifié par le développement de l'imprimerie, s'efforcera de présenter l'expression des convictions comme un moyen d'accomplissement personnel et d'émancipation de l'individu en plaidant notamment pour la tolérance dans l'approche de la différence des croyances religieuses. Ainsi, au moment même où commencent les guerres de religion, Sébastien Castellion, théologien protestant originaire du Bugey, constatant que les deux camps témoignaient de la même violence fanatique20, les adjurait de ne pas utiliser la force contre ceux qu'ils jugeaient hérétiques, et de leur résister «par parole s'ils n'usent que de parole», en citant en exemple les Turcs, qui considéraient leurs sujets indépendamment de leur religion21 En 1651, dans un Chapitre XI (De la différence des manières) de son Léviathan , Hobbes, analysant les conditions devant permettre aux hommes de «vivre en paix et en harmonie»22 constatait avec réalisme que leur manque de jugement23 les porte à s'en remettre à des ambitieux sachant se donner une apparence de sagesse en maniant éloquence et flatterie, appuyées par la «réputation militaire»24. Aussi évoquait-il avec beaucoup de pragmatisme la diffusion des idées, en insistant sur la prudence et la discrétion avec lesquelles elles devaient être exprimées25, et surtout sur le relativisme des jugements qu'elles pouvaient susciter. Dans la version initiale (en anglais) de l'ouvrage, il constatait que «...l'on donne différents noms à une seule et même chose selon la différence des passions individuelles. Ainsi, ceux qui approuvent une opinion particulière l'appellent Opinion, mais ceux qui ne l'approuvent pas l'appellent Hérésie; et pourtant le mot hérésie ne signifie rien de plus qu'opinion particulière, avec seulement une nuance de colère plus marquée»26. Le mouvement dit des «Lumières» contribuera à l'essor et à la diffusion de ces conceptions valorisant la place de l'individu dans le système social, pour aboutir à la consécration de la liberté d'expression comme norme juridique.« Sans la liberté de blâmer il n’est pas d’éloge flatteur ». La célèbre réplique de Figaro, personnage principal du Mariage de Figaro de Beaumarchais, fait de cet auteur une figure phare de la liberté d’expression27. Le droit de s'exprimer, liberté individuelle Prémices théoriques En 1784, Kant observait que «les Lumières sont pour les gens l'issue à leur propre irresponsabilité...», car selon lui, l'apport essentiel de la période était la possibilité offerte aux sujets d'exprimer leur opinion, même en critiquant les lois28. Il considérait en effet que la liberté était un droit inné (naturel) de l'individu29, et comprenait notamment la liberté de pensée et son corollaire la liberté d'expression30. Dans la pensée kantienne, la liberté n'est cependant pas sans limites. Celles-ci sont d'abord d'ordre moral. Ainsi, si dans leurs relations entre eux, les individus peuvent s'exprimer librement, l'usage de propos tels que mensonge, médisance, raillerie, est contraire à la «vertu» parce que manquant de respect à autrui31. Les restrictions sont aussi d'ordre juridique, car si le droit naturel pose pour principe la liberté individuelle, il l'assortit des bornes logiquement nécessaires à sa conservation, la liberté n'existant qu'«en tant qu'elle peut s'accorder, suivant une loi générale, avec la liberté de chacun». Ainsi, les règles de droit régissant la communication entre individus peuvent s'accommoder de la pratique moralement condamnable du mensonge, mais seulement tant qu'elle ne porte pas «directement atteinte au droit d'autrui», par exemple à ses biens32. De même, le droit dont disposent naturellement les gouvernés de critiquer les gouvernants ne va pas jusqu'à les dispenser de leur obéir, même lorsqu'ils deviennent oppressifs, car pour Kant, admettre le contraire serait remettre en cause le fondement même du système juridique33. En 1859, John Stuart Mill s'inspirera des mêmes principes dans son essai «De la liberté», devenu un des ouvrages de référence du libéralisme34, mais entretemps, le droit d'exprimer ses convictions aura été formellement consacré comme liberté individuelle par des textes solennels à valeur de norme juridique. Consécration dans les textes nationaux En Allemagne Liberté d'expression est proclamée en Allemagne, par la Loi fondamentale du 23 mai 194935. Loi fondamentale pour la République fédérale d'Allemagne (1949) « Article 4 de la Loi Fondamentale Allemande [Liberté de croyance, de conscience et de profession de foi] La liberté de croyance et de conscience et la liberté de professer des croyances religieuses et philosophiques sont inviolables. Le libre exercice du culte est garanti. Nul ne doit être astreint contre sa conscience au service armé en temps de guerre. Les modalités sont réglées par une loi fédérale. »
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