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Macron en Algérie: la course au gaz remet Alger au coeur du jeu

Publié le 27/08/2022
Macron en Algérie: la course au gaz remet Alger au coeur du jeu L'énergie à peine abordée publiquement dans la conférence de presse d'Alger. L'énergie n'est pas le "sujet central" de la visite d'Emmanuel Macron en Algérie. Reste que les livraisons de gaz sont une arme que sait utiliser à bon escient ce producteur. Les Italiens sont chouchoutés, les Marocains sont punis. Les Espagnols menacés. Et les Français ? "Le gaz n'est pas le dossier central du déplacement d'Emmanuel Macron en Algérie ". La communication de l'Elysée rabâche à qui veut l'entendre que la question énergétique passe après les sujets censés être au cœur du voyage diplomatique - et parfois irritants -, à l'instar des sujets mémoriels ou celui des visas, évoqués dès son arrivée par le Président de la République Emmanuel Macron lors d'une conférence de presse commune avec son homologue Abdelmadjid Tebboune, Pourtant, l'approvisionnement en hydrocarbures reste un enjeu clé entre les deux pays et cette thématique sera bien abordée. En 2021, 11% des importations françaises en pétrole brut venaient des puits algériens, tandis que le gaz naturel représentait environ 8% des approvisionnements, loin derrière la Norvège (36%) et la Russie (17% avant la guerre). Mais le conflit en Ukraine pousse les pays européens, et notamment la France, à se tourner vers de nouvelles sources, dans un contexte de flambée des prix. La directrice générale d'Engie, premier distributeur de gaz en France, Catherine MacGregor, est justement du voyage. Le géant français a signé début juillet un accord avec l'entreprise publique d'hydrocarbures Sonatrach sur le prix de vente du gaz pour une période de trois ans. Pour l'Algérie, tout l'enjeu est de faire fructifier cette conjoncture providentielle. Et ce même si ses infrastructures d'extraction sont vieillissantes et depuis plusieurs années, la production gazière et pétrolière diminue de façon structurelle. "La loi sur les hydrocarbures de 2019 a été conçue dans l'optique d'attirer les investisseurs étrangers", rappelle Rym Loucif, avocate d'affaires spécialiste du secteur de l'énergie. L'idée est d'ouvrir la voie à des joint-ventures avec des grands groupes internationaux impliquant un partage de la production. Toute la question est de savoir si l'Algérie est prête à céder un peu de sa souveraineté dans un domaine aussi sensible politiquement. La loi sur les hydrocarbures a suscité des oppositions. Ses détracteurs estiment qu'elle bradait la richesse nationale aux multinationales. Or, les gisements sont là, enfouis dans les sables du Sahara, et n'attendent que d'être exploités comme ceux découverts récemment dans les bassins d'Illizi et de Berkine. Pour l'Algérie, la guerre en Ukraine offre de façon inespérée des opportunités financières, mais aussi diplomatiques. C'est l'occasion par exemple de prendre sa revanche sur le Maroc. Après avoir rompu les relations diplomatiques l'été dernier avec Rabat, son ennemi juré, Alger n'a pas hésité à couper le gaz à son voisin en ne renouvelant pas le contrat de livraison transitant par un gazoduc terrestre. Plus récemment, l'Algérie a menacé de représailles l'Espagne, si Madrid s'aventurait à réexporter le gaz algérien vers le Maroc. Certes, le gazoduc sous-marin, le Medgaz, qui relie les deux pays n'a pas été coupé, mais les Espagnols ont compris le message. Ils se tournent désormais vers les Etats-Unis et leur GNL pour approvisionner leurs six ports méthaniers. Les Italiens à l'offensive Absorbée par ses problèmes internes depuis la fin de l'ère Bouteflika et le Hirak qui a suivi, l'Algérie montre aujourd'hui qu'il faut compter avec elle dans cette période de grande tension politique et énergétique. A l'instar des Russes, Alger utilise le robinet du gaz comme arme diplomatique. Dans ce contexte, profitant de cette brouille algéro-espagnole liée à la question du Sahara occidental, "les Italiens ont marqué des points vis-à-vis d'Alger, " constate François Touazi, fondateur du think tank CapMena. Et le partenariat entre les deux pays devrait s'intensifier dans l'avenir. "Dès le premier coup de canon en Ukraine, l'Italie s'est immédiatement tournée vers l'Algérie, le président du conseil Mario Draghi faisant le voyage pour sécuriser ses approvisionnements énergétiques. Au printemps, l'italien ENI et la Sonatrach ont convenu d'augmenter les volumes de gaz qui transitent via le gazoduc sous-marin Transmed dès cette année pour arriver à 9 milliards de mètres cubes en 2023/2024. Il est vrai que les relations entre les deux pays ne sont pas polluées par le "mémoriel". Et que la dépendance au gaz algérien est plus importante pour l'Italie que pour la France. Christian Chesnot
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L'énergie à peine abordée publiquement dans la conférence de presse d'Alger.
L'énergie à peine abordée publiquement dans la conférence de presse d'Alger.
© AFP - Ludovic MARIN
L'énergie n'est pas le "sujet central" de la visite d'Emmanuel Macron en Algérie. Reste que les livraisons de gaz sont une arme que sait utiliser à bon escient ce producteur. Les Italiens sont chouchoutés, les Marocains sont punis. Les Espagnols menacés. Et les Français ?
"Le gaz n'est pas le dossier central du déplacement d'Emmanuel Macron en Algérie ". La communication de l'Elysée rabâche à qui veut l'entendre que la question énergétique passe après les sujets censés être au cœur du voyage diplomatique - et parfois irritants -, à l'instar des sujets mémoriels ou celui des visas, évoqués dès son arrivée par le Président de la République Emmanuel Macron lors d'une conférence de presse commune avec son homologue Abdelmadjid Tebboune,


Pourtant, l'approvisionnement en hydrocarbures reste un enjeu clé entre les deux pays et cette thématique sera bien abordée. En 2021, 11% des importations françaises en pétrole brut venaient des puits algériens, tandis que le gaz naturel représentait environ 8% des approvisionnements, loin derrière la Norvège (36%) et la Russie (17% avant la guerre). Mais le conflit en Ukraine pousse les pays européens, et notamment la France, à se tourner vers de nouvelles sources, dans un contexte de flambée des prix.

La directrice générale d'Engie, premier distributeur de gaz en France, Catherine MacGregor, est justement du voyage. Le géant français a signé début juillet un accord avec l'entreprise publique d'hydrocarbures Sonatrach sur le prix de vente du gaz pour une période de trois ans.

Pour l'Algérie, tout l'enjeu est de faire fructifier cette conjoncture providentielle. Et ce même si ses infrastructures d'extraction sont vieillissantes et depuis plusieurs années, la production gazière et pétrolière diminue de façon structurelle.



"La loi sur les hydrocarbures de 2019 a été conçue dans l'optique d'attirer les investisseurs étrangers", rappelle Rym Loucif, avocate d'affaires spécialiste du secteur de l'énergie. L'idée est d'ouvrir la voie à des joint-ventures avec des grands groupes internationaux impliquant un partage de la production. Toute la question est de savoir si l'Algérie est prête à céder un peu de sa souveraineté dans un domaine aussi sensible politiquement.

La loi sur les hydrocarbures a suscité des oppositions. Ses détracteurs estiment qu'elle bradait la richesse nationale aux multinationales. Or, les gisements sont là, enfouis dans les sables du Sahara, et n'attendent que d'être exploités comme ceux découverts récemment dans les bassins d'Illizi et de Berkine.

Pour l'Algérie, la guerre en Ukraine offre de façon inespérée des opportunités financières, mais aussi diplomatiques. C'est l'occasion par exemple de prendre sa revanche sur le Maroc. Après avoir rompu les relations diplomatiques l'été dernier avec Rabat, son ennemi juré, Alger n'a pas hésité à couper le gaz à son voisin en ne renouvelant pas le contrat de livraison transitant par un gazoduc terrestre.

Plus récemment, l'Algérie a menacé de représailles l'Espagne, si Madrid s'aventurait à réexporter le gaz algérien vers le Maroc. Certes, le gazoduc sous-marin, le Medgaz, qui relie les deux pays n'a pas été coupé, mais les Espagnols ont compris le message. Ils se tournent désormais vers les Etats-Unis et leur GNL pour approvisionner leurs six ports méthaniers.

Les Italiens à l'offensive
Absorbée par ses problèmes internes depuis la fin de l'ère Bouteflika et le Hirak qui a suivi, l'Algérie montre aujourd'hui qu'il faut compter avec elle dans cette période de grande tension politique et énergétique. A l'instar des Russes, Alger utilise le robinet du gaz comme arme diplomatique. Dans ce contexte, profitant de cette brouille algéro-espagnole liée à la question du Sahara occidental, "les Italiens ont marqué des points vis-à-vis d'Alger, " constate François Touazi, fondateur du think tank CapMena.

Et le partenariat entre les deux pays devrait s'intensifier dans l'avenir. "Dès le premier coup de canon en Ukraine, l'Italie s'est immédiatement tournée vers l'Algérie, le président du conseil Mario Draghi faisant le voyage pour sécuriser ses approvisionnements énergétiques. Au printemps, l'italien ENI et la Sonatrach ont convenu d'augmenter les volumes de gaz qui transitent via le gazoduc sous-marin Transmed dès cette année pour arriver à 9 milliards de mètres cubes en 2023/2024. Il est vrai que les relations entre les deux pays ne sont pas polluées par le "mémoriel". Et que la dépendance au gaz algérien est plus importante pour l'Italie que pour la France.

Christian Chesnot
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