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Annaba. L’indigence culturelle perpétuée

Publié le 18/03/2010

à Annaba, initier les enfants à la culture, leur donner le goût de la découverte, leur apprendre à éprouver  du plaisir en lisant un texte, à se délecter de la lecture d’un poème ou à admirer une œuvre et donner libre cours à son imagination n’est pas chose aisée quand les parents eux-mêmes ont déjà beaucoup de mal à se cultiver dans cette société où la vacance culturelle est quelque chose de tout à fait ordinaire. Le musée d’Hippone «chôme» à longueur d’année, le théâtre, excepté quelques manifestations sporadiques et sans lendemain, n’ouvre ses portes que pour les meetings politiques, les bibliothèques servent aux révisions des cours et la maison de la culture aux expositions-ventes d’articles divers qui ne s’apparentent aucunement à la chose culturelle.Au cours de l’année scolaire, on est derrière les enfants, on les suit, on contrôle les cours enseignés en classe, on essaye d’expliquer certaines leçons supposées être difficiles à assimiler, on a recours à des professeurs qu’on paye pour améliorer les résultats et on attend les compositions pour voir si «l’investissement» a porté ses fruits sinon on redouble d’efforts pour donner plus de chances à ses enfants lors de l’examen final. L’enfant soumis à la pression de la classe, pressé comme un citron à la maison, harcelé par l’obligation de résultat exigée vit dans un stress constant si bien qu’il ne cherche plus qu’à satisfaire les desiderata  des parents qui ne reconnaissent que les études. Les quelques rares évasions que l’enfant ou l’adolescent se permet sont celles où il découvre à travers les textes étudiés en classe pendant les séances de lecture dirigée des extraits d’œuvres d’écrivains qui éveillent l’intérêt et qui poussent à aller plus loin pour découvrir d’autres horizons que ceux très limités d’une classe, d’un chez-soi ou d’une ville explorée dans ses moindres recoins. Ce sont les seuls instants où l’enfant éprouve un réel plaisir s’il est vraiment intéressé par le choix fait par l’enseignant et surtout par la présentation qui en est faite. On se met à la recherche du livre en question et on essaye de le lire, d’aller jusqu’au bout de l’histoire et d’en connaître la fin et là on est accroché, on recherche d’autres œuvres qu’on se met à dévorer avec grand appétit. Ces enfants là sont les plus chanceux puisqu’ils ont pu profiter d’un heureux concours de
circonstances qui leur a permis à travers de simples mots de voyager à travers l’espace et le temps par le fait de tourner de simples pages. La culture se met donc en place et on se surprend à citer de mémoire un passage qu’on a adoré lire et l’on se découvre des talents d’écrivain en herbe dans les rédactions qu’on remet pendant les devoirs et les compositions. Pour les autres, tous les autres, ce n’est pas le cas, alors on se rabat sur la télévision et ce qui est proposé, émissions, films documentaires, séries ou adaptations de romans écrits par de grands écrivains. Certes, on découvre là aussi une des formes de la culture mais celle-ci demeure juste le temps de l’émission pour s’estomper et disparaître rapidement contrairement à ce qu’on a lu, compris et intériorisé. Il est rare de voir des parents dans les librairies s’intéresser aux publications destinées à l’enfance et à l’adolescence, déjà qu’elles sont très rares en langue nationale, regorgeant de fautes d’orthographe et racontant des histoires qui n’intéressent personne. Ils en feuillettent le contenu pour les remettre souvent à leur place, parfois certains en achètent et essayent d’apporter un plus à leurs enfants  en leur proposant de lire à la maison avant d’aller au lit. Les ouvrages écrits en français sont inaccessibles, le niveau dans cette langue a dégringolé depuis des années et c’est beaucoup dire que  d’affirmer que les enfants lisent des œuvres qui ont bercé leurs parents dans leur jeunesse. Pendant les vacances à Annaba, c’est plutôt la plage, les jeux en bord de mer  et les flâneries dans les quartiers populaires si l’on ne s’improvise pas vendeur à la sauvette pour gagner de quoi acheter les fournitures scolaires pour la rentrée.
Les salles de cinéma n’existent plus, elles sont désespérément fermées ou transformées en salles de projection vidéo où les films de violence sont légion. La culture n’a plus droit de cité et est tout à fait exclue. Le seul espace culturel où l’on trouve quelques «privilégiés» est le Centre culturel français, qui à pignon sur rue et qui, il faut le dire, draine des centaines de lycéens et d’écoliers. On y vient, on se documente, on emprunte un livre ou une quelconque œuvre puis on les restitue une quinzaine de jours plus tard. Un autre espace, celui de l’association «El Irchad Ouel Islah», d’obédience islamiste, se contente de donner sa propre vision de la culture islamique, non sans inculquer au passage ses propres principes pour faire plus tard de ces  enfants innocents ses ouailles
et ses inconditionnels. Point donc de culture dans cette ville qui a pourtant enfanté H’sen Derdour, Hassan El Annabai, Hamdi Bennani, Lotfi Double Kanon et qui a vu officier leur aîné saint Augustin. La relève n’est donc plus assurée et on se contente de survivre dans ce désert culturel qui gagne chaque jour du terrain et qui détruit tout sur son passage, même les vestiges d’une culture qui a brillé de mille feux pendant l’Antiquité. 

La tribune > 18/03/10 >  Mohamed Rahmani

M. R.

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