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Annaba. Grève des travailleurs des installations portuaires : Les exportations de phosphate bloquées

Publié le 09/07/2012

Port AnnabaLe préjudice d’environ 25 millions de dollars consécutif à plus d’un mois de grève observée l’an dernier - fin avril - par les 1650 travailleurs des deux filiales, Somiphos et Installations Portuaires de Annaba (IPA), les responsables de la société nationale du fer et des phosphates (Ferphos Group), semblent n’en avoir cure. En cause, voilà plus d’un mois que les exportations de phosphate sont bloquées, et les 250 agents des IPA une nouvelle fois en grève ouverte depuis le 5 juin, et pas l’ombre d’une action tendant à trouver un compromis n’a été engagé pour y mettre fin.

La question que d’aucuns se posent : comment peut-on faire la sourde oreille et se complaire dans un tel silence ? A moins que du côté de la direction générale comme des responsables du Groupe et de la holding Manadjim El Djazaïr, l’on ne soit conforté par les bons résultats de 2011, un chiffre d’affaires de près de 8 milliards de DA et de substantiels bénéfices. Une année rose que Ferphos devait en grande partie à la conjoncture exceptionnelle du marché d’alors. Les révoltes arabes l’ont rendue des plus favorables, traduisant de fait le célèbre proverbe qui dit «Nul ne perd qu’autrui ne gagne». Les sévères crises politiques qui ont ébranlé en 2011 la Tunisie, la Syrie et l’Egypte ont fait perdre à ces trois principaux concurrents arabes de l’Algérie de conséquentes parts de marché. Le long ralentissement de leurs exportations respectives - 3 MT sur 7 à 8 MT de production/an pour la Tunisie, 1,7 MT pour la Syrie et 1,4 MT sur 2 MT pour l’Egypte - qui s’en est suivi a libéré la voie au phosphate algérien.

Le retour en force sur l’arène internationale ainsi facilité a permis à Ferphos de placer plus de 1,5 million de tonnes sur nombre de marchés, y compris ceux qui lui étaient difficilement accessibles. Malheureusement, l’euphorie aura été de courte durée ; elle a laissé la place au désenchantement. Les 1650 travailleurs de Somiphos et leurs 250 collègues de IPA font face à l’amère déception de voir leur espoir de maintenir l’élan de relance des exportations - 1,3 à deux milliards de tonnes de réserves dormantes dont regorge le bassin de Djebel Onk au sud de la wilaya de Tébessa - s’effondrer comme un château de cartes. D’autant que, selon les représentants des travailleurs protestataires de l’IPA, rien n’a été fait pour les motiver davantage en améliorant leurs conditions socioprofessionnelles.

Les revendications émises lors de la grève de 2011 n’ayant pas été satisfaites, malgré les engagements alors pris par l’employeur. Ce qui les a poussés à revenir à la charge plus d’une année après avec les mêmes revendications : révision de la grille des salaires, prime d’intéressement, part du bénéfice, application de l’avenant relatif aux échelons, en plus d’autres points tels que le départ du directeur de l’unité, la prise en charge immédiate des problèmes liés à l’état de leur usine, car mettant en danger la vie des travailleurs, risques d’effondrement des tunnels (T20-T10-T11), multiplication des maladies professionnelles (problèmes dermatologiques et insuffisances respiratoires), portique de chargement immobilisé depuis des années, la loco BB 600 en panne (la traction des wagons faite à l’aide de pelle mécanique), détérioration de la voie ferrée, transporteurs (T20-T22-T23-T14) dans un état catastrophique… A défaut de voir toutes ces revendications aboutir, les grévistes menacent d’aller vers une radicalisation plus poussée de leur mouvement contestataire. En attendant, la placidité des responsables aussi bien à Annaba qu’à Alger risque d’accentuer les pertes d’argent et d’affecter davantage la crédibilité de Ferphos Group auprès de ses clients qu’elle a à peine commencé à reconquérir.

Véritable saignée et mutisme des responsables !

Le développement à l’international ne constitue-t-il pas un axe de crédibilité clé pour toute entreprise qui cherche à s’imposer sur le marché pour s’y installer durablement comme un fournisseur privilégié ? 1950 DA de perdus pour chaque tonne de phosphate transportée – depuis les sites miniers de Djebel Onk (Tébessa) pour le compte de Ferphos par sa filiale de transport routier Sotramine, la Société nationale des transports ferroviaires (SNTF) ainsi que les 50 camions gros tonnage privés. Aussi, si la grève venait à perdurer, l’immobilisation d’un mois des installations portuaires peut coûter 110 dollars/t alors que quelque 200 000 t de phosphate sont exportées/mois bon an, mal an. Malgré tous ces lourds préjudices auxquels s’ajoutent les 5000 000 dollars de frais induits par le retour à vide de plusieurs navires - jusqu’à ce week-end, 4 bateaux étaient toujours en rade (deux totalisant 44 000 t  et deux de 8000 t chacun) - et environ 200 000 dollars de frais de surestarie, certes assumés par les acheteurs mais devant être répercutés sur Somiphos. Cette filiale phare de production de phosphate basée à Tébessa pèse plus de 70% du portefeuille Ferphos Group, en termes d’effectifs, d’activité ou de chiffre d’affaires.

Jusqu’à présent, aucune réaction à ce qui s’apparente à une véritable saignée économique n’a été signalée. La direction générale de Ferphos et le Groupe minier Manadjim El Djazaïr n’ont toujours pas bougé d’un iota pour parvenir à un compromis avec les grévistes. Comment interpréter ce mutisme ? L’employeur espérait un essoufflement de la contestation en laissant pourrir la situation, mais ne s’imaginait pas rencontrer une telle détermination, ont rétorqué Khemissi, Abdelghani, Chaouki, Bachir, Ahmed, Mustapha et Ramdane, des travailleurs rencontrés aux alentours du port de Annaba. «Depuis plus d’un mois que nous sommes en grève, aucun PV n’a été établi. C’est l’indifférence la plus totale. Ferphos est une entreprise riche, cette richesse profite aux autres et pas aux pauvres ouvriers que nous sommes. En plus de la précarité salariale dans laquelle nous sommes confinés, nos conditions de travail sont inhumaines, dignes de l’esclavage et personne ne semble s’en soucier. Sommes-nous des sous-hommes ? En tout cas, aux yeux de notre directeur - filiale IPA -, nous le sommes puisqu’il n’a pas hésité à user de propos  injurieux et irrévérencieux à notre égard. C’est pourquoi les 250 travailleurs exigent son départ», se sont-ils indignés.

Dans ce cyclique conflit, de quel côté se range le syndicat ? «Nous approuvons cette grève, nous soutenons les travailleurs protestataires car leurs revendications sont légitimes, mais ne le dites pas dans votre journal», a déclaré une source syndicale qui a tenu à garder l’anonymat, peut être par «peur» d’éventuelles représailles ! Quant au directeur général d’IPA et le PDG du Groupe, ils sont injoignables. «En réunion à Alger», réponse devenue coutumière chez Ferphos Group. En tout état de cause, pour ces responsables une grève a décidément besoin d’être longue pour daigner agir et éviter à l’entreprise des pertes se chiffrant à des millions de dollars au moment où, de l’autre côté de la Méditerranée, l’heure est à l’austérité et à la recherche la plus étendue possible de la moindre opportunité d’entrée d’argent.

Naima Benouaret [EL WATAN - 09-07-2012]
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