Annaba: PALAIS DE LA CULTURE - Le cinéma, témoin privilégié de la société

Tel était le thème des Journées « Annaba Cinéma » organisées les 22 et 23 octobre par le Centre Culturel Mohamed Boudiaf géré par Mme Menadjlia Djamila. Une manifestation de haute facture, puisqu’elle a accueilli de grandes personnalités du cinéma national, parmi lesquels le Dr. Ahmed Bedjaoui, Benamor Bakhti, Salah Ougourt… De grands films produits avant 1988, et qui avaient fait l’apogée du cinéma algérien ont été projetés le premier jour de cette manifestation culturelle, à savoir « Taxi el makhfi » de Benamor Bakhti, « Toujar el ahlam » du réalisateur Mohamed Ifticène, suivi d’un débat. « Carnaval fi dachra » de Mohamed Oukaci et « Aaîla ki ness » d’Ahmed Tribeche ont été visionnés le lendemain, après une conférence donnée dans la matinée par Ahmed Bedjaoui, et animée par Djamel Hazourli, suivie avec beaucoup d’intérêt par une assistance composée en grande partie d’étudiants. L’intervention de celui qui est connu par tous les Algériens comme « M. Cinéma », a apporté un nouvel éclairage sur le cinéma algérien dans notre pays, qui avait commencé avec les premiers films sur la société algérienne sous l’occupation, réalisés par des Français. Au cours de la Révolution, plusieurs films réalisés par des Algériens ont appuyé le mouvement armé, en faisant connaitre aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, le refus du peuple de continuer à subir le diktat des colons. Les gens avaient alors un engouement pour le cinéma, et ce moyen de communication qui traitait de leurs problèmes les plus profonds a joué un grand rôle dans le changement des mentalités. Exemple, entre autres, du film « Yasmina » qui mettait en scène une petite fille pour la première fois. Projeté dans une salle de l’ONU en présence du futur président des USA John Kennedy, ce film a apporté un appui de taille à l’opinion publique internationale, habitué à la désinformation par les médias français sur le mouvement révolutionnaire et l’aspiration profonde du peuple. Le Dr Bedjaoui devait parler de l’émancipation de l’enfant et la femme au sein d’une société en pleine transformation et leur rôle dans la marche de la révolution. Le cinéma philosophique s’est intéressé aux femmes et aux enfants porteurs de messages, pour véhiculer l’image d’une Algérie qui avait désormais choisi la voie de la liberté et de la modernité. Les grands évènements révolutionnaires (le 8 mai 45, le 11 décembre 1960, - le 17 octobre 61) ainsi que les profonds changements sociaux ont été filmés par des réalisateurs de talent, aussi bien au cinéma que par la télévision après l’indépendance jusqu’aux années 80, où le cinéma algérien a connu une véritable décadence qui dure jusqu’à ce jour. Le problème de formation des équipes techniques se pose avec acuité « aujourd’hui, on a recours aux techniciens français ». La fermeture des salles est une autre préoccupation de taille, qui dessert la production cinématographique « Aujourd’hui, les cinéastes sont en quête de public. Nous avons de talentueux jeunes cinéastes surtout dans le court métrage, mais ils n’ont pas de public pour les pousser à aller de l’avant, au moment où les autres pays sont en train d’augmenter le nombre de leurs salles, les nôtres ont pratiquement disparu ». Ahmed Bedjaoui, qui a fait une rétrospective du 7ème art en Algérie, n’a donné aucun pronostic pour l’avenir du cinéma dans notre pays, qui reste dans le flou et soumis au poids lourd de l’administration, alors que de jeunes talents sont en en train d’éclore ça et là. Avec quelles perspectives ?

 L'EST - 24/10/2013 - Farida H.